Le mot de l’agence de la biomédecine

L’interview

Emmanuelle Cortot-Boucher,
Directrice Générale de l’Agence de la biomédecine
L’activité de prélèvement et de greffe : un bilan 2021 positif malgré la crise sanitaire et une impulsion inédite avec le nouveau « Plan Greffe »
Emmanuelle Cortot-Boucher
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Le fait le plus notable est la mobilisation remarquable des coordinations durant toute l’année écoulée. Les coordinations sont le premier maillon de la chaîne de la greffe, sans lesquelles rien n’est possible. Elles ont permis d’amorcer cette tendance positive. J’en suis fière.

1. L’année 2021 a confronté les patients et les professionnels de santé aux effets de la crise sanitaire au long cours. Comment l’Agence a accompagné les professionnels de la chaîne du don à la greffe ?

Comme en 2020, l’année 2021 a été compliquée pour les équipes de coordinations. Bien que le Covid-19 ait continué à sévir pendant la totalité de l’année, avec des fluctuations importantes, les coordinations ont su constamment s’adapter aux variations de l’épidémie.

Nous nous sommes efforcés d’être à leurs côtés, de les accompagner au mieux, pour permettre le maintien de l’activité de prélèvement et de greffe d’organes et de tissus. Pour ce faire, nous avons notamment diffusé de nouvelles recommandations aux directions générales d’établissements de santé, d’Agences Régionales de Santé, aux équipes de greffe… L’objectif : soutenir le maintien de l’activité de prélèvement et de greffe d’organes et particulièrement le maintien de filières de Covid négatives permettant le prélèvement. À cet égard, les équipes régionales de l’Agence et les coordinations ont continué à entretenir un lien précieux. Ensemble, elles ont réussi à faire perdurer l’activité de prélèvement malgré la baisse du nombre de donneurs en mort encéphalique pendant la crise. En dépit de cette baisse recensée, les coordinations ont réussi à prélever un nombre de donneurs supérieur à celui de l’année 2020. C’est remarquable. Les coordinations ont fait « plus avec moins », elles ont repoussé les limites du prélèvement et gagné en efficacité.

2. Quel bilan peut-on tirer de l’activité greffe pour 2021 ?

Le bilan est globalement positif. Par rapport à 2020, il y eu une hausse de 19,3% du nombre total de greffes réalisées et le nombre de donneurs prélevés a augmenté de 2,7%. Le niveau d’activité d’avant crise n’est pas encore atteint mais nous nous en approchons fortement. Les chiffres attestent d’une dynamique tangible. Dans le même sens, l’activité de greffes à partir de donneurs vivants a augmenté de 30%, ce qui nous permet de retrouver notre niveau d’activité d’avant crise.

Le taux d’opposition de la population au don d’organes a, lui, légèrement augmenté : il s’établit à 33,6% en 2021, contre 33% en 2020. Un des objectifs du nouveau plan ministériel pour le prélèvement et la greffe d’organes et de tissus sera d’essayer de le faire baisser, j’y reviendrai. Ce qui compte, néanmoins, c’est plus le nombre de greffons prélevés que le taux d’opposition en tant que tel. A cet égard, nous observons, dans certaines régions, que la mobilisation des coordinations a permis de compenser la légère hausse du taux d’opposition grâce à une augmentation du recensement et du prélèvement des donneurs.

3. 2021 a été marqué par des points forts et des faits marquants. Quels sont ceux que vous retenez particulièrement ?

Le fait le plus notable est la mobilisation remarquable des coordinations durant toute l’année écoulée. Les coordinations sont le premier maillon de la chaîne de la greffe, sans lesquelles rien n’est possible. Elles ont permis d’amorcer cette tendance positive. J’en suis fière. Une mobilisation que je lie à celle des associations de patients – qui ont fait preuve d’une très forte vigilance pendant cette crise au long cours. L’Agence de la biomédecine a fait vivre un dialogue nourri avec elles.

2021 aura aussi été une année d’innovation et de progrès en transplantation. En décembre, d’abord, la première greffe d’îlots de Langerhans a été réalisée au CHU de Lille, avec de nouvelles perspectives pour les patients dont le diabète est difficile à équilibrer et pour les personnes vivant avec un greffon rénal. En février, ensuite, c’est une première naissance réalisée à partir d’une greffe d’utérus qui a eu lieu à l’hôpital Foch de Suresnes. En janvier, enfin, la mobilisation de près 50 professionnels hospitaliers pendant 15 heures a permis une double greffe des bras aux Hospices Civils de Lyon. Ce sont des prouesses, tout particulièrement dans le contexte de circulation du virus.

2021 aura été également synonyme d’anticipation, avec particulièrement la conduite des travaux requis pour préparer le nouveau plan ministériel pour le prélèvement et la greffe d’organes et de tissus. L’Association Française de Coordinations Hospitalières (AFCH) y a participé activement, notamment lors la phase de concertation de juillet et par la contribution écrite qu’elle a versée au débat.

4. Ce début d’année est marqué par l’adoption du nouveau «plan greffe». Pourriez-vous nous présenter ses grandes lignes ?

Le plan d’actions ministériel 2022-2026 donne, pour les cinq ans à venir, une impulsion inédite à la filière du prélèvement et de la greffe d’organes et de tissus. Ce plan est ambitieux, réaliste, innovant et financé.

Il est ambitieux et réaliste dans les objectifs qu’il se fixe, qui sont multiples. Il s’agit notamment d’atteindre un « couloir de croissance » défini par une trajectoire cible haute et une trajectoire cible basse. Ce choix nous permettra de tenir compte de l’évolution de paramètres exogènes à la filière qui pourraient influer sur le niveau d’activité (nouvelle épidémie, difficultés de recrutement, etc.).

Ce plan est innovant car il mobilise des leviers inédits pour renforcer les coordinations. Le recours à 150 infirmiers en pratique avancée (IPA) d’ici à 2026 permettra de soutenir les coordinations hospitalières de prélèvement, ainsi que les équipes de greffe. Des formations et des audits seront mis en place pour accompagner les coordinations dans l’amélioration de leurs pratiques. La création d’un référent « prélèvement et greffe » dans les agences régionales de santé (ARS) permettra un pilotage régional du plan décliné selon les spécificités de chaque contexte local.
Ce plan est aussi, pour la première fois, un plan financé, avec un volet budgétaire qui en fait partie intégrante. Autrement dit, toutes les actions prévues par le plan sont financées. Ce sont 210 millions d’€ mobilisés en plus pour la filière du prélèvement et de la greffe, ce qui porte à 2 milliards d’€ le montant des engagements en faveur du prélèvement de la greffe d’organes sur les 5 années du plan. Soit une hausse de plus de 10 % par rapport au budget habituellement alloué. Ce financement nous permettra un effort significatif sur la formation, la recherche, la communication, entre autres.

5. Quelles pourraient être les conséquences de ce plan sur l’activité des coordinations ?

Ce nouveau plan a été pensé à travers l’idée de parcours. Le parcours d’un patient en attente de greffe commence avec un prélèvement d’organe sur un donneur. Les coordinations sont au cœur et même au point de départ de ce parcours. Elles vont bénéficier du renfort des infirmiers en pratique avancée, elles vont profiter de la formation, des audits. Le plan va créer des indicateurs concernant la performance de l’organisation de la filière dans les établissements de santé autorisés, afin de mobiliser les directions et de créer de l’émulation. Il doit nous permettre collectivement de donner un souffle nouveau à la filière du prélèvement et de la greffe. Il nous appartient de nous mobiliser pour concrétiser l’espoir que fait naître ce plan chez les professionnels de santé et chez les patients.

Vous souhaitez en savoir plus sur le Plan ministériel pour le prélèvement et la greffe d’organes et de tissus ?
Le document complet est en ligne sur le site de l’Agence de la biomédecine :
https://www.agence-biomedecine.fr/IMG/pdf/plan_ministeriel_2022-2026_pour_le_prelevement_et_la_greffe_d_organes_et_de_tissus.pdf

Vous pouvez également consulter :
Le Plan ministériel 2022-2026 pour la procréation, l’embryologie et la génétique humaines
https://www.agence-biomedecine.fr/IMG/pdf/plan_ministeriel_2022-2026_pour_la_procreation_la_genetique_et_l_embryologie_humaines.pdf

Le Plan ministériel 2022-2026 pour le prélèvement et la greffe de cellules souches hématopoïétique
https://www.agence-biomedecine.fr/IMG/pdf/plan_ministeriel_2022-2026_pour_le_prelevement_et_la_greffe_de_cellules_souches_hematopoietiques.pdf

Un « Plan Greffe » fortement relayé par la presse
La presse généraliste nationale comme régionale – Agence France Presse, Sud-Ouest, Dernières Nouvelles d’Alsace, La Provence, Le Dauphiné, etc. – ainsi que la presse professionnelle ont mis en avant l’ambition, le caractère innovant et financé du Plan d’actions ministériels pour le prélèvement et la greffe d’organes et de tissus.

- AFP _ Pour augmenter les greffes d’organe en France, un nouveau plan d’action jusqu’en 2026
- Hospimedia : Le 4e plan Greffe se voit allouer 210 M€ pour financer des mesures nouvelles sur 2022-2026
- Le quotidien du Médecin : Prélèvement multisources, 150 IPA, 210 millions d'euros de plus... : un 4e plan greffe pour donner un nouveau souffle à la filière

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